Imiter une étoile… … pour en finir une bonne fois avec les énergies fossiles.
Bienvenue dans la science-fiction… en vrai !
C’est l’histoire d’une bande de scientifiques soutenus par des décideurs visionnaires. Des gens qui, il y a 30 ans, à l’heure où le développement durable était encore pour la plupart d’entre nous un concept abstrait, ont acquis la conviction que l’humanité n’allait pas pouvoir continuer à s’appuyer sur une énergie fossile promise… à un épuisement rapide. Que la solution que nous chuchotait le soleil depuis toujours, c’était de reproduire sur Terre l’énergie colossale qui naît en permanence… au cœur même des étoiles.
En finir avec les énergies fossiles.
ITER, en latin ça signifie « le chemin ». Ce chemin, il est… en France, près d’Aix-en-Provence, et c’est le 1er prototype mondial destiné à valider qu’on est capables, à taille industrielle et non plus seulement dans un labo, de reproduire les réactions qui sont à l’œuvre dans le cœur du soleil : la fusion de l’hydrogène ! Il y a là, à notre portée, enfin, une solution décarbonée à grande échelle, car sans les contraintes intermittentes des énergies renouvelables. Et là, question rendement, on ne joue plus du tout dans la même catégorie : avec la fusion, 1 gramme d’hydrogène produit autant d’énergie que… 10 tonnes de pétrole !
En 2 mots, la fusion, c’est l’art de forcer des atomes d’hydrogène à se rapprocher alors que leurs forces électriques les repoussent, et à se coller jusqu’au point où… il fusionnent en des atomes plus gros, de l’hélium. Et le truc intéressant, c’est que le total des éléments produits dans la fusion est… plus léger que les constituants de départ ! … Le petit peu de masse qui s’est perdue, s’est transformé en une énorme quantité d’énergie : le fameux E=mC2 d’Einstein !
Alors dans les étoiles, c’est la force de gravité, colossale, qui force les atomes d’hydrogène à se coller ensemble. Mais dans ITER, on doit tricher… en créant une température titanesque : 150 millions de degrés. 10 fois plus chaud qu’au cœur du soleil ! À cette température-là, les électrons se séparent des atomes et forment ce que l’on appelle un ”’plasma”.
La fusion nous laisse espérer une source d’énergie quasiment inépuisable (des milliers d’années de potentiel), très sûre, et d’un très faible impact sur l’environnement.
La cuisine fusion façon ITER : un défi du genre… costaud !
Costaud, déjà, parce que quand on monte à des températures pareilles, plus aucun matériau terrestre ne peut contenir cette fournaise. Donc on va devoir maintenir le plasma en lévitation dans… une cage magnétique. Le tout, entouré d’un vide le plus parfait possible. Vous avez dit science-fiction ?… Au fait, nous vous avons dit que pour confiner les 150 millions de degrés il faut… 100 000 km de brins supraconducteurs enroulés en bobines qui, elles, fonctionnent à… -269° (à 4 petits degrés du zéro absolu) ?
Mais ce n’est pas tout… il faut aussi réussir à maintenir une fusion stable, capable de produire plus d’énergie que ce qu’elle n’en a dépensé pour l’amorcer. Et le tout, sans subir de pics d’énergie (l’équivalent des éruptions solaires), qui sont trop susceptibles d’abîmer l’enveloppe. En résumé, pour nos pionniers dompteurs d’étoiles, à chaque étape il n’y a pas eu d’autre choix que l’excellence dans l’excellence !
L’avantage indirect de ces défis ? La sécurité. Eh oui, c’est tellement difficile de maintenir les conditions spécifiques nécessaires pour une fusion, qu’au moindre incident, ça ne s’emballe pas, au contraire : tout s’arrête, comme un brûleur s’éteint si on ferme le robinet.
Bref : une incroyable machine de 10 millions de pièces et presque autant de prouesses techniques… et 23 000 tonnes à la pesée (la Tour Eiffel, c’est 7300 tonnes), titanesque… mais tout en imposant des précisions d’ajustage au dixième de millimètre. Certaines pièces sont tellement monumentales qu’elles ne sont même pas transportables, et qu’il a fallu créer sur place, autour du chantier principal, les usines pour les fabriquer.
L’aventure ITER, c’est celle (plus qu’inspirante !) des efforts conjugués de 35 pays qui mettent en commun leurs moyens, dans la durée, pour réussir une prouesse fondamentalement utile. Du coup, nous, le beau chemin d’Iter, ici à bord on a vraiment envie d’y croire.
Crédits photos : Iter Organization