Jules Verne est né en France. Ça devait être prémonitoire.
Jules Verne et Michel Ardan… Méliès et son voyage dans la Lune… ça fait un certain temps que les gaulois ont le nez levé vers les étoiles, et pas seulement par peur qu’elles leur tombent sur la tête ! Morceaux choisis de vrais défis…
Plus fort que la Lune : atterrir sur… une comète !
Eh eh… déjà fait ! Le CNES a été le pivot central de la petite sonde européenne Philae, transportée à 510 millions de kilomètres de la Terre par la sonde Rosetta jusqu’à la comète… non, vous ne voulez pas que je dise son nom… bon OK je me lance : Tchourioumov-Guérassimenko. Après plus de 10 ans de voyage, fraiche comme un gardon de l’espace, Philae s’est dégourdi les pattes en tentant le 12 novembre 2014 d’aller se poser sur la comète.
Hola, tout en douceur… parce que la comète est si petite qu’elle a très peu de gravité : là-bas, les 100 kilos de Philae pesaient seulement un poids… d’1 gramme ! Le risque de rebondir était donc majeur. Bon, ça a été un peu folklorique, parce que le tandem propulseur (qui devait la plaquer au sol à l’arrivée) et harpons (pour l’ancrer) a dysfonctionné : Philae a rebondi 2 fois avant de se stabiliser à environ 1 km du site initialement prévu, en position quasi verticale. N’empêche qu’on l’a fait, et qu’on en ressort avec un apprentissage unique au monde !
Prochain arrêt : Phobos, la minuscule lune de Mars avec un énorme cocard !
Vous savez, Phobos, c’est cette petite lune (27 km sur son plus grand axe) toute cabossée qui s’est pris un énorme impact de météorite qui lui fait un cocard de légende ! Et on aimerait bien comprendre si elle et sa voisine, Deimos, sont des astéroïdes géants capturés par Mars, ou des débris de la planère elle-même, réagglomérés après un impact géant, comme pour notre Lune. Pour ça, il faut aller voir sur place, et c’est un joli travail de cascadeur !
C’est le CNES, allié à l’agence spatiale allemande, qui va fournir l’éclaireur. La mission globale, MMX (pour Martian Moons Exploration) est japonaise : lancée en 2024, elle va tenter de rapporter un échantillon de Phobos sur Terre en 2029, en essayant d’effectuer un ‘toucher momentané’ en douceur avec la sonde, doublé d’un prélèvement. La manœuvre est plutôt coton : les russes s’y sont déjà cassé les dents 2 fois.
Alors, la sonde MMX va larguer dans un 1er temps notre petit éclaireur, une astromobile autonome avec 3 objectifs : 1 – éprouver le régolite (sol) de Phobos pour en tester la texture et la résistance et anticiper ce qui se passera lors du futur ‘toucher’ de la sonde. 2- en profiter pour valider s’il est possible de rouler sur un corps avec une si petite gravité : traction, contrôlabilité… objectif : parcourir entre 30 et 100 mètres. C’est un banc d’essai avant plein d’autres cibles à explorer dans le système solaire. 3 – utiliser cette aubaine pour effectuer des observations scientifiques in situ.
Si tout se passe bien lors du largage, le petit rover, après plusieurs rebonds, se redressera sur ses jambes, aidé d’un ensemble de petits volets, et déploiera des panneaux solaires qui lui assureront une durée de vie de 100 jours. Eh, au fait : il n’a pas encore de nom : des idées ?… Moi, j’aime bien Cyrano : choir, avec panache !
Callisto, parce qu’on ne jette pas l’avion à l’arrivée à l’aéroport
Pour rendre les tirs spatiaux plus compétitifs, cela pourrait faire du sens de tenter de récupérer les fusées en les ramenant proprement au sol pour les réutiliser ensuite. Reste à valider les technologies, et évaluer quel serait le coût opérationnel global d’un tel lanceur.
C’est le but du démonstrateur Callisto (Cooperative Action Leading to Launcher Innovation in Stage Toss-back Operations), codéveloppé par le CNES et les agences spatiales japonaises et allemandes. Haut de 15 m pour un diamètre de 1m, il fonctionnera à l’hydrogène et sera entièrement réutilisable. Son 1er vol d’essai est prévu au Centre spatial guyanais en 2024 : un aller-retour jusqu’à 30 à 40 km d’altitude.
Callisto est conçu pour revenir au sol et se poser à la verticale, en contrôlant son retour grâce à des ailerons. 4 pieds se déploieront peu avant l’atterrissage. L’un des enjeux est aussi d’apprendre à cerner l’ampleur des opérations de reconfiguration nécessaires entre 2 vols successifs.
Parce que pour être viable, ça doit rester (relativement) simple et moins coûteux qu’une nouvelle fabrication entière. Mais au fait : c’est le moment d’entrouvrir pour vous la porte des labos où on conçoit les fusées… venez, le CNES vous fait signe d’entrer, et ses ingénieurs sont là pour vous raconter !
L’atterrissage de Callisto, un défi technique au sol
L’aménagement du pas de tir prend en compte les spécificités de Callisto : pour la première fois, il faut prévoir un point de décollage et une zone d’atterrissage située dans un rayon de 10 m autour de ce point. Pour que le véhicule puisse se poser, cette zone des 10 m devra avoir été complètement dégagée après le décollage. Il faut donc concevoir des installations sol en conséquence. Par exemple, il ne pourra pas y avoir de carneau d’évacuation. Le jet de gaz émis lors du lancement se déversera directement sur le sol, conçu pour résister à la chaleur et permettre ensuite l’atterrissage. De même, les bras cryotechniques utilisés pour le remplissage des réservoirs mesureront environ 15 m, la même dimension que ceux de l’ELA4 d’Ariane 6 pour alimenter un véhicule 5 fois plus petit.
Un robot pour la mise en sécurité
Enfin, autre défi technique, il faudra pouvoir reconnecter le véhicule après l’atterrissage pour finir de le vidanger et le réalimenter en énergie : au moment de l’atterrissage, il contient encore de l’oxygène liquide et de l’hydrogène liquide. Pour des raisons de sécurité, on ne peut donc pas envoyer des personnes pour le faire manuellement. Cette mission sera donc confiée à un robot développé spécifiquement, qui permettra à distance, de rebrancher les flexibles sur Callisto.
Crédits photos :
Photo 1 : © ArianeGroup Holding, 2018
Photo 2 : © CNES, 2020